S : chapitre 3

 

¾   Je suis désolé, bredouilla Shiiba.

¾    Alors, c’est monsieur Shibano, maintenant ? C’est pénible comme travail, sympathisa Oosako.

Il s’attarda sur le manteau en poil de chameau qu’il portait et une moue involontaire déforma son visage.

¾    Tu as l’air si différent que je t’ai pris pour un gigolo, avoua-t-il.

¾    C’est le travail, dit Shiiba pour sa décharge. Où allez-vous, monsieur Oosako ?

¾    Au poste de Jyuku. Je suis content d’être revenu. J’ai décidé de reprendre le travail d’enquêteur.

Les mots d’Oosako étaient poignants, car ce travail particulier n’était pas à la portée de n’importe qui.

Les deux hommes étaient d’anciens collègues. Ils avaient travaillé ensemble au Bureau de la Sécurité Communautaire du quartier général. Ils y avaient été transférés en même temps pour y suivre une formation spéciale sur la collecte d’informations. Même si Oosako avait dix ans de plus que Shiiba, ils s’entendaient très bien à l’époque. De toutes les personnes que Shiiba avait connues, il avait été le seul à le considérer sans préjugés en l’acceptant tel qu’il était. Après ça, ils avaient été affectés ensemble dans une nouvelle section de la Sécurité Communautaire puis aux Services Secrets de la Division anti-armes et antistupéfiants. Ce fut là-bas qu’ils avaient commencé le travail d’enquêteur à proprement parler.

Cependant, six mois seulement après leur arrivée, Oosako avait demandé une réaffectation et quitté le quartier général. Il n’était pas le seul. Sur l’ensemble des assignés, à peine la moitié était restée dans le service. Certains avaient rendu leur insigne de police et d’autres comme Oosako avaient préféré changer de département. Les uns après les autres, tous avaient abandonné le métier d’enquêteur qu’ils jugeaient trop difficile.

¾    Tu es maintenant au LCO 5 ?

 Shiiba acquiesça et Oosako enchaina :

¾    Comment est-ce ? J’ai entendu dire que c’était très dur.

¾    Le nom est différent, mais à part ça, le travail ne change pas tellement de celui effectué à la Sécurité Communautaire, déclara Shiiba.

¾    Je suppose qu’ils ont raison, articula Oosako, un terne sourire ridant ses joues. Peu importe à quel point une organisation change, les gens à l’intérieur restent les mêmes.

En 2003, la Police Métropolitaine avait fait l’objet d’une énorme restructuration suite à laquelle une toute nouvelle section, baptisée, Bureau de Lutte contre le Crime Organisé, avait vu le jour. Jusque-là, le département gérant les crimes de gangs et celui des affaires relatives aux étrangers étaient sous la juridiction conjointe du Bureau des Enquêtes, de la Sécurité Communautaire et de la Sécurité Publique. Mais les méthodes des organisations du crime évoluent. En s’internationalisant, elles étaient devenues au fil des années très pointilleuses au point de poser des problèmes non négligeables à la police japonaise. Par conséquent, une nouvelle division possédant d’énormes moyens de répressions avait été créée. Et c’était le Bureau de Lutte contre le Crime Organisé ou LCO pour faire court.


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