En chemin, Li Shuo appela la maison pour annoncer son arrivée sain
et sauf sur le sol new-yorkais.
Oncle Guang lui jeta un coup d’œil à travers le rétroviseur
interne.
- J’aimerais vous voir venir plus souvent, à l’avenir, dit-il,
son regard retournant sur la route. Monsieur et son épouse parlent régulièrement
de vous. Ils sont déjà âgés. Je crains qu’ils se sentent seuls.
- Oui.
Li Shuo se souvint du coup de fil de son père. La raison pour
laquelle il voulait qu’il revienne de toute urgence demeurait floue. Cela avait
un rapport avec le Groupe Ennan, mais il n’en savait pas plus.
À cause de ses problèmes cardiaques, le père de Li Shuo, un
ancien directeur de la troisième plus grosse compagnie de comptabilité, des États-Unis
avait dû démissionner de son poste. Maintenant, il travaillait comme conseiller
financier du Groupe Ennan, une grosse compagnie d’exports-imports entre la Chine
et les États-Unis. Le président de ce groupe était également un Chinois et les
deux hommes étaient des amis de longue date.
Même si le père de Li
Shuo aurait voulu occuper ses fonctions de directeur jusqu’à l’âge effectif de
son départ à la retraite, son corps en avait décidé autrement. La pression et le
stress qu’engendrait ce travail ne convenaient plus à son pauvre cœur malade.
Vivre la vie d’un semi-retraité et d’un travailleur à temps
partiel n’était pas si mal, songea Li Shuo en pensant à l’état de santé de son
père. Il se demanda pourquoi il lui avait demandé de revenir. Tenait-il encore
à ce qu’il le remplace dans ses fonctions ? Mais il avait clairement refusé d’entrer dans sa
boite quand il était à l’université. En outre, il avait ses propres affaires en
Chine. Alors, cela semblait plus improbable pour lui de revenir, désormais.
Il ne comprenait vraiment pas du tout ce que son père attendait
de lui. Et puisqu’il ne pouvait pas deviner les pensées de son père, il cessa
de réfléchir sur la question.
Tandis que le véhicule roulait, il dériva son regard à
l’extérieur de l’habitacle. Il avait quitté les États-Unis après l’obtention de
son diplôme universitaire et il ne revenait qu’une ou deux fois dans l’année.
Alors le paysage qui défilait sous ses yeux lui semblait à la fois familier et
inconnu.
Il aimait les nombres depuis l’enfance. Aussi avait-il étudié la comptabilité. Cependant, au moment de s’établir, d’ouvrir sa propre boite, il avait trouvé la mégalopole new-yorkaise trop saturée. Toutes les grosses compagnies avaient des liens étroits entre elles et compliquaient la survie des petites entreprises. Le relationnel, la réussite par réseau, le parrainage, tout ce qu’une entreprise devait faire pour survivre dans une gigantesque ville comme New York l’ennuyait. C’est pourquoi il était retourné en Chine. Il ne regrettait pas sa décision puisqu’il avait désormais son propre univers.
Li Shuo regarda
son téléphone portable. Il était encore minuit en Chine. Cette personne se
levait généralement vers sept heures du matin, songea-t-il. Très ponctuel. Il
sourit et envoya un message.
« Petit Chengxiu. Je suis arrivé à la maison. Quand
tu te réveilleras, envoie-moi un message. J’aimerais que tu t’entretiennes
avec ma mère. »
Ce serait bien si ces deux-là échangeaient quelques mots. Li
Shuo esquissa un rictus amusé en se figurant l’image de sa mère et de son petit
ami en grande conversation. Il ne pouvait pas s’empêcher de sourire niaisement.
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Ps : Les Chinois ont tendance à appeler de manière
affective les gens qui leur sont chers « Petit », « Xiao » en chinois.
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