Une fois ses mots crachés, Xue Meng leur tourna le dos, son visage
vers l’extérieur. Ses épaules tremblèrent légèrement alors qu’il retenait ses
larmes.
- Ce n’est pas comme si nous avions dit que nous n’allions
pas sauver Chu-zongshi…
- Oui, nous nous souvenons tous des choses que Chu-zongshi a
faites pour nous. Évidemment, nous n’avons pas oublié. C’est de la pure
calomnie de la part de Xue-gongzi de dire de telles choses. Nous traiter
d’ingrats — je ne le supporterai pas.
- Mais en y réfléchissant, Mo Ran n’était-il pas aussi un disciple
de Chu-zongshi ? demanda quelqu’un à voix basse. Je dois
dire que lorsqu’un disciple devient un malfaiteur, il est normal que le maître
en prenne la responsabilité. Comme on dit, « l’éducation
sans instruction est le défaut du père, et l’enseignement sans discipline est
le défaut du professeur ». C’était peut-être inévitable.
Alors de quoi se plaint-on ?
Là, c’était vraiment aller trop loin, et cela avait été
immédiatement décrié.
- Baliverne ! Fais attention à ce que tu dis !
La personne qui l’avait décrié se tourna ensuite vers Xue Meng
avec un air diplomatique.
- Xue-gongzi, un peu de patience…
- Comment puis-je être patient ?
Xue Meng lui coupa la parole, le regard furieux.
- C’est facile pour vous tous de rester là à discuter, mais
c’est de mon shizun dont il est question ! Le mien ! Je ne
l’ai pas vu depuis des années ! Je ne sais même pas s’il est
vivant ou mort, et encore moins comment il va !
Pourquoi pensez-vous que je sois là ?
Sa respiration était aussi lourde qu’irrégulière et les coins
de ses yeux rougissaient tandis qu’il continuait.
- Ne me dites pas que vous attendez tous ici en espérant que Mo
Weiyu descend de la montagne de son propre chef pour s’agenouiller devant vous
et demander grâce.
- Xue-gongzi…
- Je n’ai plus aucune famille dans ce monde, hormis Shizun.
Xue Meng libéra d’un coup sec sa manche de la prise du vieux
moine.
- Très bien, vous ne voulez pas y aller ?
demanda-t-il d’une voix rauque. Alors, j’irai moi-même.
Sur cette ultime phrase, il s’élança à l’ascension de la
montagne, une figure solitaire avec une seule épée.
Le vent froid et humide se mêlait aux murmures du feuillage ; comme
si, combinés à l’épais brouillard qui s’étendait à perte de vue, d’innombrables
fantômes malveillants et des esprits chagrins erraient au milieu des arbres
bruissant et chuchotant.
Tout seul, Xue Meng gravit le sommet en direction du magnifique palais de Mo Ran, qui se dressait comme un phare dans la nuit, éclairé par la lumière calme des bougies. Alors qu’il s’approchait, son regard se posa sur trois tombes au pied de la Tour Perce-Ciel. Lorsqu’il s’approcha pour regarder de plus près, il vit que de hautes herbes avaient poussé sur le premier tertre funéraire, et sur sa pierre tombale avaient été griboullés les mots suivants :
« Tombe de
l’Estimée Concubine Chu. »
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